L'auteur

THIERRY DEBRTOUX

Né à Bruxelles le 16 janvier 1963 (à Watermael-Boitsfort) : le peintre belge Paul Delvaux fut son voisin pendant une dizaine d’années.

Il découvre la passion du théâtre à l’âge de six ans en interprétant le rôle de Baloo dans le Livre de la Jungle de Kipling (lors d’une fête scolaire), devient instituteur primaire, enseigne pendant un an puis commence des études d’acteur à l’INSAS (Institut National des Arts du Spectacle), fait la rencontre du dramaturge français Michel Vinaver lors d’un stage d’écriture et écrit sa première pièce à la sortie de l’INSAS en 1985.

Depuis, il alterne les métiers de metteur en scène, d’auteur et d’adaptateur pour la télévision française. Il a reçu plusieurs distinctions dont le Prix de la COCOF pour le meilleur spectacle 1992 avec Termini Roma ). La poupée Titanic lui vaudra les prix de l’Union des Artistes, de la SACD-Lansman et de l’Académie Royale de Langue et de Littérature Française de même qu’une nomination comme meilleur auteur aux Prix du Théâtre 2000.

Ses pièces, généralement créées en Belgique, sont reprises dans d’autres pays francophones (dont la France) mais aussi en traduction. Viennent ainsi de sortir aux éditions FIDES (Roumanie) dix-sept de ses textes en quatre volumes.

Metteur en scène, comédiens et assistante

  • Tous mes rêves partent de gare d’Austerlitz
  • Le Roi lune
  • Regarde maman, je danse!
  • Le bain / Le bâillon
  • Ecris que tu m’embrasses
  • Le Roi lune
  • Le visiteur
  • Ex-voto
  • L’abribus
  • Le chemin des passes dangereuses
  • Le Roi lune
  • Le bain / le bâillon
  • Regarde maman, je danse!
  • Karamel
  • Nature et dépassement
  • Ecris que tu m’embrasses
  • Seul dans Berlin
  • Le Roi lune
  • Le visiteur
  • Victoria Station…
  • Le monte-plats
  • Erotica
  • Huis-clos
  • Assistante

La galerie

On en parle...

Un nouveau triplé gagnant pour la compagnie L’Autre Scène. Comme toujours dans cette troupe, le texte est foisonnant, drôle et thématiquement riche, la distribution homogène et inspirée, la mise en scène réglée au cordeau.
Le cadre et les personnages en sont intéressants : situer la pièce en milieu carcéral n’est pas si fréquent – et dans une prison de femmes encore moins. Entrer dans la psyché de ces six femmes n’avait rien non plus d’évident et pourtant le défi est relevé haut la main : tout sonne juste dans leur comportement, leurs propos, leurs aspirations, leurs angoisses. Tout cela semble sortir de la plume d’ une femme ayant vécu dans sa chair l’expérience carcérale. Étonnamment, il n’en est rien, l’auteur est un homme, Mohamed Kacimi, qui est parvenu à capter, sans la déformer ni la fantasmer par le regard masculin, l’authentique féminité de ses six héroïnes
Le thème principal – leur privation de liberté et comment elles la gèrent – est abordé avec pertinence au travers de registres divers et variés qui s’entrechoquent, passant de la crudité crasse à la pure poésie en passant par la loufoquerie, l’émotion, la finesse… Bien articulée autour d’un lieu et d’un moment uniques (la bibliothèque de la prison où se prépare pour cinq codétenues un repas de Noël très particulier), la pièce, souvent très drôle, prend encore plus de vigueur avec l’introduction d’un sixième personnage, Frida, qu’on vient d’incarcérer après lui avoir retiré sa fille Alice. C’est pour cette mater dolorosa le désespoir le plus absolu, la porte ouverte à la dépression et qui sait, le drap en nœud coulant autour du cou. La chance veut qu’elle tombe au milieu de ces cinq femmes aguerries, jeunes et moins jeunes, qui vont lui apprendre une règle fondamentale : si le réel est insupportable alors il faut recourir à l’imaginaire. Si Frida veut voir une forêt au-delà des barreaux plutôt que des hauts murs gris, alors elle la verra..
C’est autour de Frida que va se nouer la séquence la plus brillante, complexe et touchante, en même temps qu’un rien burlesque, l’immixtion dans la piéce de Kacimi de celle de Musset, « On ne badine pas avec l’amour ». C’est une œuvre qui, sur un plan personnel, compte beaucoup pour la nouvelle prisonnière et que, pour lui remonter le moral en la reliant à sa fille, deux des taulardes vont interpréter à leur manière. Le langage un peu précieux du XIXe siècle romantique va bientôt se voir chahuter par l’argot contemporain comme vont fuser de triviaux commentaires autour de la scène d’explication de Perdican et sa bien-aimée. Le mélange d’aujourd’hui et d’hier, la confusion entre la situation exposée et la situation personnelle des deux interprètes improvisées, vont conduire à une salade russe inédite à base de slapstick échevelé et de tragique sous-jacent.
Jusqu’au bout (la scène finale avec les six femmes en figure de proue du bateau « L’Espoir »), « Tous mes rêves partent de la gare d’Austerlitz » nous aura secoués, bousculés, bouleversés, aura menacé de faire déborder nos canaux lacrymaux, nous aura titillé les zygomatiques, tout en suscitant la réflexion.
Mais par-dessus tout, Kacimi aura su nous faire aimer ces femmes, malgré leurs propos parfois grossiers, malgré leur racisme affiché, malgré leur mauvaise foi exaspérante. Au bout du compte, on les admire pour leur sens de la solidarité et leur propension à dire oui à la vie.
La mise en scène de Jean-Marc Wagner, précise, efficace, rend justice au texte. Quant à l’interprétation des six actrices, elle est parfaite, chacune imprimant son talent et sa personnalité à l’anima de son personnage respectif. Il serait dès lors bien osé et bien injuste de décider qui de Marie-Jo et Élodie dal Pozzolo, d’Évelyne Frisquet, de Fabienne Thévenin, de Myriam Timon et de Sophie Burger est la meilleure. Elles sont toutes à leur tour et ensemble… la meilleure !

Guy BELLINGER

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